Chroniques d’Houplin-Ancoisne

La commune d’Houplin-Ancoisne est implantée en bordure du Mélantois sur un ample vallon en pente douce (altitude moyenne 25 m). Situé à l’ouest de Seclin, le village d’une superficie de 648 ha, est lové entre la becque d’Emmerin et les rivières de La Deûle et de la Naviette. Dans cette partie basse et jadis inondable de la commune, les marais ont de tout temps été exploités surtout pour la forêt, les pâturages et de la tourbe. Au delà de la digue naturelle des marais (1), les terres du Sauteau recouvertes de limon fertile seront dès la Préhistoire destinées aux cultures de céréales, de pois, de lin, puis de la wèdre (6) qui fournit le bleu pastel, et plus récemment de féverole, pomme de terre, betterave, chicorée, houblon, tabac et maïs.

Dès le Néolithique, l’habitat est attesté par une remarquable et conséquente cité lacustre (2). Ce premier hameau datant de 3500 ans avant l’ère chrétienne a été découvert en 1877 à l’emplacement actuel du Parc Mosaïc.
Des Ménapiens (galli = gaulois belges) aux Romains, les voies de communication entre Sauteau, Marais et Deûle, ont permis l’installation du premier village de Leschins, site païen équipé d’un Wachemy rituel. De l’occupation romaine subsistent trois villae répertoriées de grande taille et un temple.
Les débuts du Moyen Âge lègueront aux archéologues des vestiges de l’époque mérovingienne puis carolingienne. L’exceptionnelle et rarissime nécropole de plus de 350 sépultures mérovingiennes découvertes en 2009 sur les terres de Beaumanoir, a principalement retenu leur attention.
Les chanoines de Seclin établissent leurs domaines, longeant les voies et parcellant les marais assainis vers la grande rivière. De la Deûle en remontant vers le Sauteau, les Abbés d’Anchin prennent possession des terres d’Ancoisne qu’ils administrent par une Mairie et une Pouillerie dès le XIIe siècle. La première Mairie d’Houplin date de 1174 et appartient au chapitre de la Collégiale de Douai. Cette période chrétienne, riche de ses Abbayes et de la Collégiale de Seclin, permet l’installation de Hoplin-lez-Seclin sur les terroirs de Leschins et de la Croix traversés par des voies romaines et gauloises en direction de la Pouillerie et la Deûle. Le nouveau village prend forme et une seconde chapelle est édifiée sur l’emplacement actuel de l’église Saint-Martin. Il ne reste plus trace du premier édifice, ni du premier château au bord du marais et du chemin d’Endrumetz.

Au XIIe et au XIIIe siècle, les propriétaires échangent des parcelles pour créer des pré-carrés encore en place de nos jours. Des seigneurs investissent les hem (= maisons, villages sur des landes de terres) et jusqu’à la Révolution, la fertilité des limons et des marais leur permettra de s’enrichir. Dans cette configuration hydro-géologique particulière, les associations des propriétaires avec les plus grands de la contrée confirment le développement d’Houplin et de son hameau Ancoisne . Les frontières du village sont figées dès le XIIIe siècle, à l’exception du « marais de Santes dit d’Ancoisne ».
A cette époque, l’Abbaye de Loos s’approprie La Pouillerie et 60ha (3) , les chanoines de Seclin installent les dépendances de leur Prévôté. Châtelains établis : BOISGRENIER, La TROUILLERE, CHALENTON, LANDAS, FATRISSART, Le BLANCQ, Du CHASTEL DE PETRIEUX De BEAUMANOIR, De la LONGUERIE, De la FONTAINE, De ROSBECK ont une réputation ecclésiastique, politique ou militaire européenne, notamment au XVIe siècle sous Charles QUINT.

Jusqu’à la révolution Beaumanoir appartient aux DUCHATEL comtes DEPRIEUX; Dernier de la lignée :Philippe Alexandre Albéric de PETRIEU decédé en 1791.

Au XIXe siècle, le paysage de la commune est profondément modifié

– elle intègre dans son territoire les 54 ha du Marais de « Santes dit d’Ancoisne » dont une partie est actuellement occupée par le Parc Mosaïc
– De nouveaux bourgeois propriétaires depuis la vente des Biens Nationaux, édifient quelques belles demeures mais aussi des fermes et des sites industriels (sucreries, distilleries, torréfaction de la chicorée, fabrique d’engrais, filatures, malteries ,et brasseries … )
– les zones de marais sont asséchées, en particulier à partir de 1856 lorsque sera creusé sur 4,5 km le canal reliant Seclin à la Haute Deûle.
Alors que les agriculteurs restent nombreux au début du XXe siècle, les activités professionnelles se diversifient dans le village et les compétences de beaucoup d’artisans (bâtiment, pavage des voieries, travail du bois… ) sont reconnues dans la contrée . L’occupation du village lors des deux conflits mondiaux concerna les houplinois tant au niveau humain que l’habitat bombardé.

En 1950, Houplin attache le nom de son hameau dont la population est équivalente pour devenir la commune d’Houplin-Ancoisne

L’origine du nom du village serait Hoplin forme ancienne de Houplin; le radical germanique op indique généralement des terres en position élevées – voire une digue -, sans doute au-dessus de l’eau (suffixe –lin = eau, lac) bordant les marais. Des étymologistes donnent un autre version : Houplin viendrait d’Oppilinum, désignant le domaine d’un certain Oppilo; le suffixe d’origine gauloise –inum a servi à baptiser nombre de villae romaines. Dans le toponyme Ancoisne, -coisne peut signifier soit le chêne en celte, soit une fosse à l’époque où les Alains occupaient la région, et le préfixe an- un habitat. Une autre variante  serait anconna qui évoque une courbe de la Deûle (radical gaulois anco = courbe) et suffixe  -onna utilisé pour nommer nombre de cours d’eau).

Au fil des temps, la réputation de la commune s’est établie par la présence de rivières et de canaux, d’un port ancestral, de ressources naturelles abondantes (forêt, silex, argile, craie, tourbe…),  de cultures variées, de prairies permettant la diversité de l’élevage, d’un monde agricole, artisanal et industriel dont l’excellence est souvent citée dans des publications reconnues  au niveau européen.Le Parc Mosaïc inauguré en  2004 sur le site de l’ancienne propriété SCHOTMANS (5),  propose aux visiteurs la découverte du « Jardin des cultures ».

  En parcourant les circuits de randonnée ou les nombreux chemins piétonniers verdoyants de Houplin-Ancoisne, quelques sites actuels  peuvent encore évoquer certaines légendes: le Bois aux loups, le Marais maudit,  la ruelle des Chats,  les fontaines rituelles Pavillon et Caramaras .

Houplin-Ancoisne a conservé un impressionnant patrimoine, souvent niché dans le sous-sol,  et sous-estimé . Certains parlent encore le picard. L’Association  Grand-Père a dressé une liste représentative des principaux éléments et structures encore visibles:

Patrimoine paysager :

  • La Deûle canalisée à partir de 1272 ,de La Bassée à Lille quai du Wault (7)
  • Le canal de Seclin  1857 (7)
  • La Naviette  navigable dès le Moyen-Âge depuis les Euwis, jusqu’au Bac à Wavrin
  • Le tracé d’une rivière disparue : le Wanbecque(douves de la Pouillerie)
  • Les marais avec leurs tourbières (8) et leurs trenquis
  • Le marais maudit, célèbre pour ses sables mouvants ,désastreux en 1566 pour les Gueux en révolte
  • Le Sauteau avec ses digues naturelles aménagées en chemins, voies et routes depuis les galli
  • La voie de Saint Piat à Wez Macquart (Chapelle d’Armentières) signalée dès le XIVe siècle
  • Le chemin des Postes qui depuis Louis XI, reliait Le Bourget à Lille (Malle Poste)
  • Les chemins de la Prévôté, de l’Alambic , la voie de l’Abbé,Endrumez ….
  • Les anciennes carrières de craie et d’argile

Patrimoine architectural et historique :

  • L’Eglise Saint-Martin : XIIe-XIIIe siècles, transformée aux XVe et XVIIIe siècles, son clocher aura déménagé à 9 reprises (4, 9 et 15)
  • Notre Dame de Lourdes, dont la première pierre est posée en 1900 (10)
  • L’oratoire  devenu par la suite Chapelle d’Ancoisne
  • Quatre chapelles ,deux cimetières et calvaires.
  • La Cense de la Pouillerie, attestée en 1241, reconstruite en 1743, propriété de l’Abbaye de Loos jusqu’à la Révolution (3)
  • Une « carrière » vers le Sauteau rejoignait en droite ligne l’Abbaye de Loos
  • La ferme du château du comte de Santes, son moulin et ses écuries (11)
  • Les vestiges de la propriété  Flamen (1750), ses écuries, son débarcadère
  • Les vestiges du château du Bois de la Fontaine aux Loups (12)
  • La fontaine Pavillon (13)
  • Le Clos de la Longuerie avec jadis château, laiterie, usines ; ce site est aujourd’hui partiellement occupé par la Maison de la Nature et de l’Environnement (14)     
  • Les écuries, ferme du château de Beaumanoir (15)
  • Les glacières
  • La motte d’Endrumetz
  • La motte du moulin à wèdre et du moulin à froment (15)
  • La scierie et ses bâtiments construits « en rouges barres » (16)
  • La Redoute d’Houplin, 1890 (17)

 

Sources

  • (2) : Houplin-Ancoisne « Le Marais de Santes » Parc de la Deûle : un site exceptionnel de la fin du Néolithique, I Praud et al, INRAP 2004
  • (3 et 4) : Plan de Fives à Seclin, à Houplin sur le Marais et à Ancoine son hameau, 1735
  • (15) : Album de Croÿ, tomeXIII : Chatellenies de Lille, Douai, Orchies,1603,; planche 102, p 50, édition 1986
  • les autres documents proviennent de la photothèque de l’Association Grand-Père, auteur de cet article.

Président: Christian Desjardins et son équipe 735 Rue Roger Salengro, 59263 Houplin-Ancoisne
tel: 03 20 90 06 59 – 06 08 63 24 25 – mail: assograndpere@yahoo.fr

Rédaction : juillet 2014, sur les bases des connaissances actuelles